Déjà victimes emblématiques du changement climatique, les États et Territoires insulaires océaniens voient leur biodiversité menacée, dans le cadre d’une crise sans précédent aux conséquences environnementales et sociétales majeures. En juin dernier, la communauté scientifique et les acteurs du développement se sont mobilisés pour dresser un état des lieux et émettre des recommandations pour faire face aux enjeux spécifiques de cette région. Le 5 septembre prochain, le rapport Biodiversity, a pressing need for action in Oceania sera présenté aux décideurs océaniens à l’occasion de la réunion annuelle du Programme régional océanien de l’environnement (PROE).

Coordonné par Claude Payri et Eric Vidal, directeurs de recherche à l’IRD, le rapport est issu des conclusions des experts et des rapporteurs de l’atelier « Biodiversité en Océanie » qui s’est tenu à Nouméa les 24 et 25 juin derniers. Il sera présenté le 5 septembre à Apia (Samoa) aux ministres de l’Environnement des 26 États et territoires du Pacifique, lors de la réunion du PROE.

Un plaidoyer rappelant l’urgence d’agir pour préserver la biodiversité océanienne

Les conclusions de ces journées font écho aux spécificités océaniennes en matière de crise de biodiversité et d’érosion des services écosystémiques. Le rapport souligne notamment que la connaissance scientifique de la biodiversité océanienne est encore insuffisante ; une partie importante de celle-ci est par ailleurs contenue dans les savoirs traditionnels dont il est nécessaire de préserver la survivance et la transmission.

Parce que l’Océanie représente à elle seule près de 10% de la superficie de la planète et que ses problématiques démographiques, économiques, écologiques et culturelles sont différentes de celles de l’Asie voisine, une conclusion s’est imposée aux experts réunis à Nouméa : cette région et sa biodiversité remarquable doivent impérativement faire l’objet d’une attention spécifique, notamment dans le cadre des évaluations régionales de IPBES (plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques). Les chercheurs plaident donc pour que les spécificités de l’Océanie soient pleinement reconnues au sein de l’immense région Asie-Pacifique, qui constitue jusqu’à présent le cadre de l’évaluation régionale.

Les conclusions viendront également alimenter les forums régionaux et internationaux organisés en 2020, notamment le One Planet Summit (Papeete, avril 2020), la 10e Conférence de la conservation de la nature et des aires protégées en Océanie (Nouméa, avril 2020), le Congrès mondial de la nature de l’UICN (Marseille, juin 2020) et enfin la COP15 de la Convention sur la biodiversité biologique (Kunming, octobre 2020).

 

La biodiversité océanienne en quelques chiffres

« Hotspot » mondial de la biodiversité, l’Océanie abrite six des 36 points chauds recensés dans le monde. La région constitue l’un des épicentres de la crise mondiale de la biodiversité. Alors qu’un quart des récifs coralliens, écosystèmes les plus riches en diversité biologique, sont localisés dans le Pacifique, on estime que seulement 10 à 20 % des espèces marines sont connues.

Plus de 1 200 espèces d’oiseaux ont disparu en Océanie au cours des trois derniers millénaires, un phénomène lié à la présence humaine. La région possède le taux le plus élevé au monde d’espèces menacées d’extinction. Pour les 30 000 espèces végétales répertoriées, les taux d’endémisme sont extrêmement élevés, allant de 75 à 90 %. L’Océanie est donc un territoire exceptionnel pour la préservation de la biodiversité mondiale. L’enjeu y est d’autant plus grand que les ressources naturelles constituent les bases de la sécurité alimentaire et font partie intégrante de la culture des populations insulaires.

Prochaine étape : la Conférence annuelle du PROE

Les recommandations issues de l’atelier « Biodiversité en Océanie » seront présentées lors de la 29e Conférence régionale du PROE (Programme régional océanien de l’Environnement, SPREP en anglais), qui se tiendra du 29 août au 6 septembre 2019 à Apia (Samoa).

Une délégation de l’IRD sera présente, en lien avec le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et le représentant de la France auprès du PROE, pour relayer les conclusions des scientifiques réunis en juin à Nouméa et répondre aux questions des ministres en charge de l’environnement des pays et territoires océaniens. Il s’agit de la première étape dans un agenda international chargé des instances gouvernementales sur les questions de biodiversité.

Créé en 1992 par ses 26 États membres en vue de soutenir la coopération et la coordination interrégionales, l’objectif du PROE est de contribuer à la gestion de l’environnement et au développement durable dans la région.

L'atelier régional de juin 2019

Le colloque « Biodiversité en Océanie » a rassemblé en juin dernier environ 80 experts et 70 représentants de la société civile à Nouméa, venus de la région Pacifique, d’Europe et du Canada. Il a été organisé par l’IRD, la CPS (Communauté du Pacifique), le PROE (Programme régional océanien pour l’environnement), le Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, les deux consortia d’enseignement supérieur, recherche et innovation de la Nouvelle-Calédonie (CRESICA) et de la Polynésie française (RESIPOL) et la FRB (Fondation pour la recherche sur la biodiversité) et l’AFD, avec le soutien de l’UNC (Université de la Nouvelle-Calédonie), de l’UPF (Université de la Polynésie française), de l’Ifremer (Institut Français de la Recherche pour l’Exploitation de la Mer), de l’IAC (Institut Agronomique néo-Calédonien).


Contacts : claude.payri@ird.fr // eric.vidal@ird.fr

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