Le colloque "Travail, petits métiers et subsistance en ville" aura lieu du 4 au 5 novembre au CELAB, à l'Université du Burundi (Bujumbura). Il a vocation à revenir sur la question du travail et de ses mobilisations dans les milieux urbains africains, à partir d’enquêtes menées dans plusieurs villes burundaises ainsi qu’à Yaoundé, au Cameroun. Il vient clore le programme de recherche de la JEAI Suburbu (Subsistance urbaine et mobilisations du travail au Burundi, 20e-21e s.), mené par une équipe associée IRD-Université du Burundi.
Le projet Suburbu visait à éclairer des dynamiques peu investies par la recherche consacrée au Burundi, parce qu’elles touchent le milieu urbain, qui n’est pas censé « représenter » le mieux le pays puisque près de 90 % de la population habite encore aujourd’hui en milieu rural. La création des villes au Burundi a marqué l’acte d’imposition de l’État colonial sur une société organisée d’habitude en habitat dispersé, et il est notable que le pays reste en 2021 l’un des moins urbanisés du continent. Pourtant, depuis l’indépendance, les taux de croissance urbaine, soutenus par une démographie active, ont été spectaculaires (11 % en moyenne depuis près de 30 ans) et ont rempli la capitale et les villes secondaires de nouveaux citadins. Les villes se sont étalées, mais aussi dégradées, à la faveur de l’exode rural et des « crises » politiques ; de nouvelles réalités sociologiques sont apparues et ont affecté en profondeur les rapports économiques, les hiérarchies sociales et les formes économiques de la subsistance en ville.
En prenant acte de ces mutations, l’équipe pluridisciplinaire Suburbu (histoire, géographie, sociologie, science politique) a voulu contribuer à la compréhension des nouvelles formes de l’ordre social, politique et économique qui fondent la société burundaise contemporaine et influeront sur son développement futur. Elle a visité ces questions en entrant par la porte des catégories, des représentations et des mobilisations du travail : des « petits métiers » permettant aux nouveaux arrivants, souvent jeunes, de subsister dans un environnement urbain difficile ont été étudiés, ainsi que des activités partagées telles que les travaux communautaires ou l’agriculture urbaine. Ces entrées ont permis de suivre sur la durée les liens entre travail et développement urbain et humain, les dimensions individuelles et collectives des transformations sociales, et enfin de saisir les usages des mobilisations du travail en ville, que celles-ci soient le fait d’un État nécessiteux et astreignant, d’une élite avide de légitimation ou des travailleurs eux-mêmes, gagnés au modèle d’une citoyenneté revendiquant des droits. Au final, la société burundaise a été appréhendée dans ses figures complexes pour alimenter une réflexion plus large sur les politiques de développement et de lutte contre la pauvreté.
La JEAI Suburbu, composée d’enseignants-chercheurs et d’étudiants de l’Université du Burundi, a voulu associer dans ce colloque de restitution d’autres chercheurs travaillant sur des problématiques convergentes. Des diplômés du Master en socio-anthropologie de l’Université du Burundi ont ainsi été invités, tout comme des collègues d’autres universités africaines. La pandémie mondiale du Covid-19, qui avait déjà empêché la tenue en 2021 de cet événement, a contraint, hélas, plusieurs invités d’Afrique de l’Est (Tanzanie, Kenya) à renoncer à leur participation. En revanche la JEAI est heureuse d’accueillir deux collègues camerounais dont les communications permettront d’ouvrir à la comparaison la réflexion sur le travail, ses mobilisations et la subsistance quotidienne dans les villes africaines.
Ce colloque bénéficie de l’appui de la Faculté des Lettres et Sciences humaines (FLSH) de l’Université du Burundi, de l’Institut de recherche pour le développement (IRD, France) et du soutien du Centre de recherche sur le développement dans les sociétés en reconstruction (CREDSR, UB, FLSH), que l’équipe Suburbu remercie tous vivement pour le soutien. Il se prolongera du 13 décembre 2021 et au 14 janvier 2022 par une exposition photographique ouverte à tou·te·s qui sera installée à l’Institut français du Burundi (IFB, Bujumbura). Cette exposition itinérante, « African Workplaces », voyagera de l’Éthiopie au Kenya en passant par le Burundi avant d’être présentée l’an prochain en France. Elle propose le regard pluriel de neuf photographes et chercheur·se·s d’horizons divers sur le travail en Afrique, passé au second plan de la réflexion dans la recherche francophone depuis la fin des années 1990, mais que des études récentes participent à remettre sur le devant de la scène.
Regarder la vidéo réalisée sur le colloque: https://youtu.be/7FbxOG5Ds24
Pour en savoir plus sur les Jeunes Equipes Associées à l'IRD (JEAI) et les autres outils de collaboration internationale :