Les chercheurs réunis à Sète les 7 et 8 novembre 2018 lors de l’atelier "La recherche française autour du programme international de recherche de l’initiative 4 pour 1000 : les sols pour la sécurité alimentaire et le climat" ont lancé un appel pour un "programme scientifique ambitieux" pour la mise en œuvre du volet recherche de l’initiative.

Jean-Luc Chotte, co-président du Comité scientifique de cet atelier, a rappelé la forte mobilisation de la communauté scientifique française depuis la COP21. "Nous contribuons au nécessaire dialogue entre tous les acteurs impliqués dans le développement durable : scientifiques, ONG, organisations professionnelles, décideurs. Cependant, après ces trois années, il est temps que la recherche dispose de moyens financiers à la hauteur des enjeux et de l’urgence climatique. Il est temps pour les laboratoires de recherche français, de produire des nouvelles évidences scientifiques complémentaires à celles qui fondent le "4 pour 1000", afin d’alimenter les décisions politiques à venir. Il est temps que ces évidences nourrissent le débat et contribuent aux Objectifs de développement durable (ODD). Ce que nous appelons le volet recherche de l’initiative doit devenir un programme de recherche national et international".

L’Appel de Sète a déjà recueilli une cinquantaine de signatures, parmi lesquelles des chercheurs du Cirad, du CNRS, de l’IDDRI, de l’INRA, de l’IRD, de l’IRSTEA, mais aussi leurs partenaires du Brésil, d’Espagne, de Madagascar, du Sénégal, du Maroc.

Appel de Sète

L’initiative internationale " 4 pour 1000 : les sols pour la sécurité alimentaire et le climat" a été lancée par le gouvernement français le 1er décembre 2015 lors de la COP 21 à Paris. À la fois un plan d’action et un programme de recherche et de coopération scientifique, elle a conduit la communauté internationale à s’engager dans la voie qui vise à montrer que le secteur "Agriculture-Foresterie-Autres usages des terres" joue un rôle essentiel pour renforcer la sécurité alimentaire, atténuer les changements climatiques et s’y adapter. Accroître la quantité de carbone stockée durablement dans les sols via la photosynthèse de la biomasse végétale (transformation du COatmosphérique en carbone organique) pourrait contribuer à diminuer le CO2 atmosphérique et par suite l’augmentation de la température à la surface de la planète. Selon l’Accord de Paris, celle-ci ne devrait pas excéder 2°C. Or les réductions des émissions de gaz à effet de serre consenties par les États signataires de l’Accord ne permettent pas d’atteindre cet objectif. Si en  priorité une réduction immédiate des émissions anthropogéniques des gaz à effet de serre de tous les secteurs doit être promue, celle-ci devra s’accompagner d’un stockage de carbone dans les sols. Cela permettra d’améliorer simultanément la qualité des sols, la production agricole et l’adaptation des systèmes agricoles aux changements climatiques.

Nous, chercheurs et acteurs de terrain réunis à Sète les 7 et 8 novembre 2018, affirmons que la préservation et l’augmentation durable du stock du carbone dans les sols est un objectif scientifiquement fondé et techniquement faisable. Nous affirmons également que compte tenu des urgences relatives au climat, à la biodiversité et à la dégradation des terres, l’initiative "4 pour 1000" doit être, dès à présent, soutenue pour sa mise en œuvre. Nous n’avons cependant pas, aujourd’hui, toutes les clés pour agir. Pour les trouver ainsi que pour favoriser l’insertion de la séquestration du carbone dans les sols dans l’ensemble des stratégies en appui à l’accord de Paris visant aussi les Objectifs du développement durable, la recherche est nécessaire.

Pour éclairer et accompagner l’action, un effort de recherche théorique, expérimentale et participative est nécessaire. Nous rappelons qu’intervenir sur la dynamique du carbone dans les sols, c’est intervenir sur des systèmes complexes et diversifiés. Cela nécessite la prise en considération des savoirs locaux des acteurs de terrain, mais également la mobilisation d’une large expertise scientifique (pédologie, agronomie, écologie, anthropologie, économie, géographie, sociologie, droit et sciences politiques, climatologie) dans une démarche interdisciplinaire qui hybride les savoirs des chercheurs à ceux des acteurs de terrain.

Trois ans après le lancement de l’initiative "4 pour 1000", la mobilisation des chercheurs de tous les établissements de recherche français doit pouvoir s’appuyer sur un effort de recherche substantiel, à la hauteur des enjeux et de leur urgence.

Les chercheurs et les acteurs de terrain réunis à Sète les 7 et 8 novembre 2018 déclarent que les enjeux de l’initiative "4 pour 1000" imposent le financement immédiat par la France d’un programme scientifique ambitieux.

Ils se mettent à la disposition des autorités compétentes pour en concevoir les objectifs et les modalités de mise en œuvre.


Contact : Jean-Luc Chotte , référent "4 pour 1000" de l'IRD