Professeur titulaire en génétique et amélioration des plantes à l’université Jean Lorougnon Guédé (Daloa, Côte d’Ivoire), Sélastique Akaffou collabore avec les scientifiques de l’UMR DIADE depuis 1994 en tant que spécialiste des caféiers sauvages africains. Il répond à nos questions.

Branche de caféier

© IRD - Romain Guyot

Qu’est-ce qui vous a donné envie de devenir scientifique ?

Je pense que ma sœur ainée y a été pour beaucoup. Elle savait m’expliquer les mathématiques et les sciences physiques que je maîtrisais bien au collège et au lycée. Mêmes facilités pour la biologie, ce qui m’a conduit à un baccalauréat série D (SVT). Mes choix pour l’Université étaient : 1) Mathématiques, 2) Physique et la Chimie et 3) la Chimie, Biologie et Géologie. C’est le troisième choix qui m’a ouvert les portes de l’Université. Par la suite, j’ai eu un véritable coup de cœur pour la génétique végétale.

Equipe de la mission de prospection des caféiers (C. stenophylla) dans la forêt classée de l'IRA

© IRD - Romain Guyot

Pourquoi avoir choisi de travailler avec l’IRD ?

C’est la renommée, le prestige de l’IRD. Quand je terminais mon DEA?Diplôme d’Etudes Approfondies en Biotechnologie et Amélioration des Productions Végétales (en 1993), j’ai fait la rencontre de Nanga Coulibaly, Directeur du Département Café-Cacao de l’Institut des Forêts (IDEFOR-DCC)?Aujourd’hui Centre National Recherche Agronomique en Côte d'Ivoire. Celui-ci souhaitait faire former et recruter un généticien du caféier pour son département. Les chercheurs qui avaient le grade requis pour encadrer une thèse sur le caféier se trouvaient à l’ORSTOM?Ancien nom de l’IRD. C’est ainsi que j’ai débuté mes travaux sur les caféiers en 1994, avec le généticien Jacques Louarn. Par la suite, j’ai intégré la grande équipe café de l’IRD - Perla Hamon, Alexandre de Kochko, Romain Guyot et Serge Hamon - qui a été pour moi une seconde famille.

Prospection de Coffea stenophylla en forêt (Côte d’Ivoire)

© Sélastique Akaffou

Quelles activités menez-vous sur le terrain ? en laboratoire ?

Actuellement, mes principales activités sur le terrain sont la prospection de Coffea stenophylla en forêt. Ce caféier sauvage, collecté dans les années 1970 sur deux sites en Côte d’Ivoire par Julien Berthaud (ORSTOM), est à l’origine de la collection ivoirienne. Nous visitons des endroits prospectés ou non par ce précurseur afin de préserver in situ et ex situ le maximum de diversité de cette espèce. Par exemple en collectant boutures et plantules et en installant celles-ci en pépinière et en champ. Par ailleurs, une étude de la variabilité agro-morphologique est réalisée. Enfin, des hybridations avec le caféier Coffea canephora (Robusta), cultivé en Côte d’Ivoire, seront effectuées ultérieurement. Nos travaux en laboratoire – réalisés en collaboration avec Romain Guyot (DIADE) à l'IRD - portent sur la diversité génétique et biochimique et sur la recherche de gènes d’intérêts.

Coffea stenophylla en champ à l’Université Jean Lorougnon Guédé, Daloa (Côte d’Ivoire)

© Sélastique Akaffou

Comment vos travaux contribuent-ils à l’amélioration des conditions de vie dans votre pays ou région ?

Nous cherchons à produire de nouvelles variétés de caféiers hauts producteurs, ayant une bonne qualité organoleptique?Goût et odeur et résistantes à la sécheresse, devenue une forte contrainte pour les cultures en Côte d’Ivoire. Plus de 200 000 familles pratiquant la caféiculture dans mon pays sont confrontées à l’irrégularité des pluies et/ou à leur mauvaise répartition qui causent d’importantes mortalités et pertes de production. Ces mêmes difficultés s’observent dans d’autres pays de la sous-région (Ghana, Bénin, Togo) qui eux aussi cultivent uniquement le Robusta. Or Coffea stenophylla possède des caractéristiques intéressantes uniques : résistance à la sécheresse, faible teneur en caféine, obtention aisée d’hybrides avec C. canephora et bonne qualité organoleptique comparable à l’Arabica d’Ethiopie. Nous disposons d’une bonne collection et d’une forte diversité de ce matériel et pouvons donc espérer trouver les candidats recherchés soit parmi les hybrides interspécifiques, soit parmi les génotypes exceptionnels de Coffea stenophylla. Tout ceci permettra aux producteurs d’avoir une plus-value économique et une amélioration de leurs conditions de vie.

Caféier en cours de croissance

© IRD - Romain Guyot

En quoi votre recherche répond-elle à la science de la durabilité ?

Notre recherche permet de préserver du matériel précieux et de disposer d’une forte variabilité génétique qui pourrait être exploitée à tout moment. Ainsi du matériel résilient pourra être produit si une nécessité advenait. Nous rédigeons nos projets de recherche conjointement avec nos partenaires de l’IRD et du Laboratoire d'Amélioration de la Production Agricole de l'UFR Agroforesterie. Nous collaborons ainsi avec des pédologues, des botanistes, des phytopathologistes, des génomiciens?Qui analysent les génomes, des biochimistes et des spécialistes des SIG?Système d’information géographique. Outre ces scientifiques, nos activités impliquent des acteurs variés : producteurs, populations locales et industriels.

Contact science : Sélastique Akaffou, Université Jean Lorougnon Guédé (Côte d’Ivoire) selastique.akaffou@ujlg.edu.ci


Contacts communication : Fabienne Doumenge, Julie Sansoulet communication.occitanie@ird.fr