Aboutissement récent de plus de six décennies de mesures, une ambitieuse base de données des débits des cours d’eau d’Afrique est désormais mise à disposition des chercheurs du monde entier. Réalisée par des scientifiques de l’UMR HSM, en collaboration avec leurs partenaires à l’international, SIEREM regroupe près de 1500 stations de mesure, réparties sur la plupart des régions du continent africain. Un travail des plus complets et inédit à ce jour.

Du fait de la faible densité des réseaux de mesures sur le continent africain, les recherches menées sur l’hydrologie de ce continent et, plus largement, sur les impacts environnementaux du changement global (ressources en eau, sécheresses, inondations, etc.), sont fortement freinées par le manque de données sur les débits des cours d’eau. De plus, les données existantes sont rarement accessibles aux chercheurs.

Surveillance des crues, Niger

© IRD - Moussa Malam Abdou

Données hydrologiques : recherche multi-acteurs au long cours

Pendant des décennies, les hydrologues de l’ORSTOM puis de l’IRD ont procédé à des mesures de débits pour un grand nombre de fleuves et rivières principalement situés en Afrique de l’Ouest et Centrale. Les réseaux de mesures installés ont ensuite été progressivement repris en mains par les services nationaux en charge de la gestion des ressources en eau et des risques de ces pays. Le laboratoire HydroSciences Montpellier, anciennement Laboratoire d’Hydrologie de l’ORSTOM, a assuré la maintenance et la gestion continue de cette base de données historiques élaborée dès les années 1960. Depuis le milieu des années 1980, cette base de données hydrométrique et pluviométrique (SIEREM) a été enrichie par des sources de données complémentaires, via les services nationaux africains mais également les initiatives Flow Regimes from International Experimental and Network Data (FRIEND) de l’UNESCO et Hydrological Cycle Observing System (HYCOS) de l'Organisation Météorologique Mondiale. "Ces programmes ont notamment permis d’assurer le transfert d’expertise vers les pays africains en ce qui concerne le maintien des réseaux de mesures et la gestion des bases de données", affirme Yves Tramblay, hydrologue à l'UMR HSM.

Formation aux mesures de terrain, Master Géosciences, Université Mohammed V, Rabat, Maroc, 2012

© IRD - Gil Mahé

Des données historiques depuis le début du XXème siècle

Un récent effort d’analyse et de critique de l’ensemble de cette base de données historique, qui a été complétée via de nombreux partenaires de pays africains, a permis de constituer la base de données la plus complète à ce jour des débits des cours d’eau d’Afrique. Cette base de données, African Database of Hydrometric Indices (ADHI) regroupe en effet près de 1500 stations de mesure des débits, réparties sur la plupart des régions du continent africain. Les régions comme l’Afrique de l’Ouest, du Sud, ou le Maghreb concentrent la plus forte densité de stations disponibles. Cette nouvelle base de données, mise à disposition des chercheurs du monde entier via l’entrepôt DataSud de l’IRD, permet d’envisager de nouveaux travaux de recherche pour mieux comprendre l’hydrologie africaine et son évolution dans un contexte de changement global (changement climatique et impacts anthropiques directs). "Par exemple, une première étude utilisant la nouvelle base ADHI a permis de mettre en évidence une augmentation du risque d’inondation pour une grande partie des bassins d’Afrique de l’Ouest et du Sud depuis les années 1980, dans un contexte où la vulnérabilité socio-économique à ces épisodes est déjà élevée", explique Yves Tramblay. Les objectifs majeurs des recherches sur l’hydrologie africaine visent à mieux comprendre l’évolution des ressources en eau et des risques associés (crues, sécheresses), grâce à l’analyse des longues séries de données qui, pour certaines, remontent jusqu’au début du XXème siècle. L’enjeu en termes de développement est de contribuer à la mise en place d’outils pour la gestion durable des ressources en eau, élément fondamental pour le développement économique (agriculture, industrie, hydroélectricité…), le bien-être des populations (assainissement, hygiène, égalité des genres, éducation…) et la préservation des écosystèmes. Il s’agit aussi de la prévention des risques, tout ceci à destination des décideurs et organismes institutionnels de ces pays.


Publications

Tramblay Y., Rouché, N. 2020, "ADHI: African Database of Hydrometric Indices", DataSuds, V2, https://doi.org/10.23708/LXGXQ9

Tramblay Y, Rouché N., Paturel J.-E., Mahé G., Boyer J.-F., Amoussou E., Bodian A., Dacosta H., Dakhlaoui H., Dezetter A., Hughes D., Hanich L., Peugeot C., Tshimanga R., Lachassagne P. ADHI: The African Database of Hydrometric Indices (1950-2018). Earth System Science Data, submitted, https://doi.org/10.5194/essd-2020-281


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Expositions

Ouvrages

Contact science : Yves Tramblay, IRD, UMR HSM yves.tramblay@ird.fr
 

Contacts communication : Fabienne Doumenge, Julie Sansoulet communication.occitanie@ird.fr